Le président sortant terminait son second mandat, durant sa longue période il avait tout fait pour que l’économie se libère, se développe ? Que ce soit avec un premier ministre de son bord ou un autre de l’opposition.
J’avais été invité à participer aux portes ouvertes d’une agence de communication à Paris. Dans les nouveaux bureaux j’avais installé une série de photographies qui avait été l’objet d’une commande quelques années auparavant, il s’agissait de la réhabilitation d’une chocolaterie implantée en centre ville. J’étais là, invité comme un partenaire possible.
J’ai entendu les amis et clients défiler durant un week-end, tous avaient des mots gentils à propos de celui qui dirigeait cette nouvelle agence. On lui souhaitait de réussir, on était sûr qu’il réussirait, on lui prédisait un bel avenir et même pire ! J’entendais quelqu’un faire une sorte de bilan de l’économie nationale et dire en résumé : « – Tu vas te gaver ! » Je regardais celui qui prononçait ces mots et tentais de deviner qui il était. Un ami, un visionnaire ? il me semblait faire parti d’une élite, celle qui sait comment sera l’économie dans la perspective de l’élection d’un nouveau président de droite. Il parlait finances et dressait une sorte de bilan qui allait être le socle du futur. « Tu vas te gaver ! » cette affirmation résonne encore dans ma tête. Tu vas te gaver ! ce n’est pas : Tu vas être heureux dans ta nouvelle entreprise. Non c’est plutôt : ne te pose aucune question, l’important est d’être le premier à prendre, quitte à se goinfrer et devenir le plus obèse car rien dans cette perspective ne peut être malheureux. Ce gavage ne nuit pas à la santé.
Dans cette même période j’avais emménagé dans une petite maison au fond d’une impasse. Ma voisine était venue me souhaiter la bienvenue, et m’avait proposé son aide en cas de besoin. Depuis ce temps tous les ans au mois mai elle m’apporte un gros bouquet de muguet et au mois de juin elle me donne des cerises de son jardin. Presque tous les dimanches sur le marché je lui prends quatre fromages de chèvre qu’elle affectionne particulièrement.
Elle était âgée et vivait seule avec un chat qu’elle tenait toujours en laisse de peur qu’il ne s’échappe ou qu’il attrape les oiseaux de son jardin. Elle ne l’a pas remplacé lorsqu’il eu la mauvaise idée de mourir.
Parfois je vais lui réparer des choses dans sa maison ou dans son jardin.
Il nous arrive d’avoir des visites désagréables ; des rats courent dans nos greniers, passent d’une maison à l’autre. La dernière fois qu’ils sont venus j’installai des pièges sous les tuiles et déposai du grain empoisonné dans quelques endroits où je supposai leur passage. Elle était venue me dire qu’elle en avait vu un dans son garage et me demandait d’aller lui acheter une grosse boite d’appâts empoisonnés dont elle me donnait la marque en me recommandant de ne pas en acheter une autre.
Je trouvais précisément ce qu’elle voulait à la jardinerie la plus proche et lui remettais le soir même. Elle commença à distribuer par petites doses les tablettes qu’elle prit soin de mettre dans une soucoupe, elle la déposa là où elle vit le rat dans son garage. Elle lui donnait à manger tout comme elle l’aurait fait avec un animal domestique en sachant qu’il ne devait pas être seul. Le lendemain tout le poison avaient été mangé. Satisfaite, elle reprit la boite et voulu remettre quelques doses dans la soucoupe mais la boite était vide ! Elle l’avait pourtant bien rangée dans un placard de son garage et les rats étaient allés se servir eux-mêmes, ils avaient tout mangé. Les rats gourmands lui avaient volé toutes les tablettes de poison. Elle ne pensait qu’à ce vol sans jamais se réjouir de l’overdose fatale qu’ils devaient tous avoir dans le corps. La boite de poison était assez onéreuse, elle avait été avalée en une soirée. Elle qui était plutôt économe ne supportait pas l’idée de cette orgie, cette boite devait servir longtemps et être rentable. Non pas rentable par son efficacité mais rentable dans le temps tout comme les économies qu’elle accumule lentement. Les rats la privaient donc, ils bouleversaient ses modes de pensée et pour faire face aux voleurs et prouver sa raison elle me demanda de retourner au magasin lui acheter une nouvelle boite qu’elle ouvrit afin de remettre quelques doses dans la petite assiette puis rangea la boite dans un endroit plus sûr. Aucun rat ne revint manger, elle ne s’en étonnait pas, ne regrettait pas son achat, elle avait sa boite de poison au cas où.
Les rats ont l’intelligence de se gaver eux-même jusqu’à mourir sans jamais disparaître !